NATHANIEL TARN
Les Belles contradictions





Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Jean-Paul Auxeméry.
Collection Du poème


Prix : 12 euros
Nombre de pages : 80
Format : 16 x 22 cm
Parution : 2018
ISBN 978-2-915684-53-7


Présentation :
C’est à la charnière d’une existence entièrement vouée au chant du monde et à l’interrogation des destins des civilisations que ce recueil a été. L’auteur, à la fin des années 60 du siècle vingtième, établit une sorte de bilan avant de passer le gué et d’entreprendre d’autres navigations intérieures. Écrit sur un des rivages ultimes de l’Europe, l’ouvrage a déjà les caractères du « poème long » tel que l’ont conçu depuis Whitman quatre générations de poètes des États-Unis d’Amérique. Nathaniel Tarn allait quitter les Galles du sud pour se fixer dans le Sud-Ouest, au contact des peuples originels. Les figures tutélaires ayant présidé à la composition du poème auront été, nommément, d’une part, l’Écossais Hugh MacDiarmid, le chantre d’une liberté sans limites dans les choix de ses propres règles, et d’autre part, Charles Olson, l’auteur sans compromis possible avec les préjugés nationaux de l’epos des origines, sous le titre des Poèmes de Maximus, qui reprend la leçon d’Ezra Pound selon laquelle poésie n’est rien sans considération du fait historique autant que des relations économiques et politiques qui président à la construction des sociétés.
Autant dire que le spectre des valeurs est étendu, et que l’angle de la vision est très large : Tarn a de plus été lui-même traducteur par exemple de Segalen ou de Neruda, et sa distinction particulière consiste en ce qu’il possède le double métier de poète et d’anthropologue (il a longuement étudié les Indiens des régions du lac Atitlán au Guatemala), si bien que si l’on veut parler d’ethnopoétique, c’est bien à Tarn qu’il faut penser en premier. Cette double appartenance a constamment nourri son œuvre et sa réflexion sur les moyens et les fins du lyrisme.
Il a fait le choix de focaliser Les Belles Contradictions sur ce qu’il nomme "la quête de la réalité" – de la "fleur", l’"innocence première", jusqu’au "fruit", tout qui peut manifester et épuiser la complexité des aptitudes de l’humanité à réaliser le réel.
Les quinze sections du poème suivent une progression : l’introït évoque la naissance d’un être neuf, paré pour affronter sa tâche : la vérité de l’homme ne se conçoit pas sans l’union en un seul corps des qualités du chamane (le poète, à l’écoute des bruits venus des profondeurs) et l’homme du savoir scientifique (l’ethnologue, attelé à son travail de sympathie active). Intervient ensuite le thème central sous la figure du Mam, "l’ancien des jours" de la civilisation maya des hautes terres, dont Tarn peut se dire le disciple ; puis, une adresse aux femmes, mères sur tous les continents ; après un détour par le mythe œdipien fondateur, le poème enchaîne ses laisses ainsi jusqu’à la section dixième, une des plus significatives : elle est dédiée à la ville de Prague, et surtout à la "Madone", la vraie selon Tarn, celle du portail du transept sud de la cathédrale de Strasbourg, allégorie de pierre représentant la synagogue aux yeux bandés, aux "ovaires vieux de siècles", au "sang de dragon", au cœur par conséquent des préoccupations historiques et spirituelles.
Les dieux président aux croisements du mortel, du délétère, et du sacré, de l’inviolable, parmi les multiples sociétés qui peuplent le monde. L’examen débute alors véritablement avec la section onzième – à partir de la Mappa Mundi conservée à Hereford. Retour ensuite au territoire américain, pour parvenir enfin à un hommage rendu aux maîtres de la parole poétique du siècle, de Vallejo à Breton, de Rilke à Pessoa. Enfin, conclusion, non exempte d’une touche d’inquiétude, sus l’invocation de la dame en bleu et à la chevelure rousse de Seurat, ultime figure féminine de la Shekhina et de la Synagogue de Prague (voir la dixième section), semblable à la Marie Madeleine de la fable. 
Nathaniel Tarn est né à Paris en 1928, et après la Seconde Guerre mondiale, a poursuivi des études de littérature et d’histoire à Cambridge, en Angleterre ; à Paris, ensuite (Sorbonne, Musée de l’Homme, Centre de formation aux recherches ethnologiques, École des Hautes Etudes et Collège de France) ; puis à Yale et Chicago; enfin, à la London School of Economics. Son travail d’anthropologue l’a amené sur le terrain, principalement au Guatemala, chez les Mayas des Hautes Terres, et il s’est, par ailleurs, impliqué dans la Sociologie des Institutions Bouddhiques, surtout en Birmanie. Professeur à la School of Oriental & African Studies de Londres entre 1959 et 1967, et aux États-Unis, aux universités de Princeton, de Pennsylvanie, de Rutgers, entre autres, il a aussi enseigné en Chine. Tarn a publié son premier livre, Old Savage/Young City, en 1964 et plus de 35 livres, ainsi qu’articles, plaquettes, etc. ont suivi. En France, il a été inclus, parmi ses pairs, dans l’anthologie Vingt poètes américains publiée par M. Deguy et J. Roubaud, chez Gallimard, en 1981.