H. C. ARTMANN
Le soleil était un oeuf vert
Traduit de l’allemand (Autriche) et présenté par Jacques Lajarrige.
Collection Du poème
Prix : 12 euros
Nombre de pages : 88
Format : 16 x 22 cm
Parution : 2011
ISBN 978-2-915684-29-2
Présentation :
L’insatisfaction latente que suscite sans cesse chez Artmann la plate réalité du monde appelle inévitablement des recompositions inédites. Aucune forme ne répond mieux à cette aspiration que le mythe fondateur. Aussi n’est-il pas surprenant que le poète, dans Le Soleil était un œuf vert (1982), se soit essayé à l’exercice du récit cosmogonique pour révéler au lecture ce que Moïse et Darwin avaient jusqu’alors tu l’un et l’autre. L’originalité de ce projet est de ne pas tenter une répétition de la création originelle, mais de suggérer au travers de nombreuses variantes comment tout aurait pu commencer. Artmann ne revendique en effet jamais la répétition fidèle du geste archétypal d’un Dieu créateur, dont les pouvoirs et jusqu’à l’existence demeurent douteux. Ne cherchant pas à retracer un état paradisiaque antérieur, la cosmogonie perd toute fonction purificatrice et renonce à toute visée eschatologique. Chacun des vingt-sept épisodes propose en conséquence de nouveaux commencements possibles et non pas la reprise du temps à son commencement. Les visions héraclitéennes de l’Éternel retour cèdent ainsi le pas au nouveau mythe de l’Éternel devenir. Aussi les créations ne débouchent-elles jamais sur un état de réconfortante plénitude ou d’achèvement corporel. La maison-noisette, l’homme-poisson, la femme-fougère sont autant de recompositions hybrides et grotesques, qui célèbrent au travers de priapées outrancières un monde vivant, c’est-à-dire en perpétuel mouvement et en perpétuelle rébellion contre l’idée même de la mort. Pour chanter cette indétermination existentielle, le récit recourt à une alchimie poétique qui emprunte ses ingrédients au récit biblique de la Genèse comme aux mythes des peuples amérindiens ou aux croyances des Esquimaux et les recompose ad libitum selon une logique propre qui fait la part belle au hasard et à l’imagination.
Né le 12 juin 1921 à Vienne, Hans Carl Artmann a très tôt manifesté une grande curiosité pour la littérature et les langues, qu’il étudiera toute sa vie en autodidacte de génie. Enrôlé en 1940 dans la Wehrmacht, il passe une grande partie de la guerre sur le front de l’Est. Grièvement blessé l’année suivante, il met sa convalescence à profit pour écrire ses premiers poèmes. De retour à Vienne, Artmann participe ensuite de manière décisive dès 1950 au renouveau de la vie littéraire et artistique autrichienne, notamment au sein du célèbre Groupe, dont il est l’inspirateur et la locomotive, en contribuant notamment à faire redécouvrir le dadaïsme et en acclimatant au contexte local l’héritage surréaliste. Poète globe-trotter, véritable Protée du monde des lettres, il s’est essayé avec une grande originalité à tous les genres et tous les styles, du récit picaresque au haïku japonais, de la parodie de récits fantastiques (Dracula, Frankenstein) aux bergeries baroques en passant par la farce viennoise façon Nestroy ou le montage surréaliste, Artmann s’est promené avec aisance et délices dans tous les genres, tous les styles, toutes les époques de l’histoire littéraire. Tour à tour poète lyrique, auteur dramatique ou prosateur, son aisance trahit partout la même désinvolture, le même goût pour l’invention. Artmann a par ailleurs laissé une œuvre considérable en tant que traducteur de Villon (en dialecte viennois), Quevedo, Goldoni, Molière, Labiche, Musset, H. Ph. Lovecraft etc.